Hello mes petits clous !
Hier soir, je me suis perdue dans les bois.
Je cherchais des champignons pour le repas du soir. Il faut dire que c’est le début de la saison, et je connais peu de choses meilleures au monde qu’une omelette aux girolles, aux cèpes ou aux morilles...
Après quelques minutes de marche, sous des frondaisons orangées par le soleil couchant, je suis tombée sur une clairière herbue, bien ronde, qui me rappelait vaguement quelque chose. Vous connaissez cette sensation diffuse de déjà vu, qui peut vous assaillir parfois, sans pouvoir exactement mettre le doigt sur le souvenir que cela a réveillé en vous ? C’était exactement cela. Je reconnaissais cette clairière, mais il était matériellement impossible que je sois venue ici auparavant, physiquement du moins.
En même temps que cette connaissance, une sensation de peur s’instilla en moi. Je me sentis en danger, comme traquée, dans ces bois étrangers et pourtant familiers.
Je sus, instantanément, que je ne devais pas rester ici, en pleine lumière, vulnérable. Je longeai la lisière des arbres, et m'enfonçai plus profondément dans la forêt, en contournant le buisson de sumac vénéneux qui était exactement à sa place, de l’autre côté de la clairière.
Après le buisson, la forêt s'assombrit brusquement. Les arbres étaient plus hauts, d’essences différentes. Ils semblaient bien plus vieux, largement centenaires. La peur dans mon cœur se précisa.
En avançant, je fus frappée par le silence. Plus un son, plus d’oiseaux farfouillant dans les quelques feuilles mortes déjà tombées, à la recherche de larves d’insectes, plus de mouches bourdonnant dans un rayon de soleil, plus de grincements de branches dans le vent.
Ce silence en devenait assourdissant. Tendant l’oreille, je perçus un murmure très faible, comme le bruit d’un ruisseau qui courrait sous la mousse, vers ma gauche.
Je décidai d’aller dans cette direction, de rechercher l’humidité favorable aux sporophores convoités.
M’enfonçant au cœur de la forêt, je progressai difficilement, dans ce qui ressemblait de plus en plus à un taillis impénétrable de ronces entremêlées, tout chemin disparu depuis longtemps. Pas moyen de faire demi-tour, je continuai à avancer coûte que coûte, sur un terrain qui s’élevait maintenant en pente douce. Brusquement, sans que rien ne l’annonce, je me retrouvai au bord d’un escarpement là où je ne voyais qu’un enchevêtrement de branchages quelques instants auparavant. Le ruisseau était là, à quelques dizaines de mètre en contrebas, et je devais descendre une pente boueuse et presque à pic pour y parvenir.
En me retournant, je ne vis qu’une masse compacte et hostile d’arbustes épineux, et les griffures nombreuses sur mes mollets me dissuadèrent de tenter la traversée dans l’autre sens. Et puis, j’avais toujours ce sentiment d’urgence qui m’aiguillait.
Je posai doucement et sans bruit le pied gauche bien à plat dans la descente, puis transférai lentement une partie de mon poids sur ma jambe avant, et je ramenai le pied droit. Ce léger mouvement me déséquilibra, je glissai et tombai jusqu’en bas, ruinant au passage mon pantalon et ma dignité.
J’atterris presque dans le ruisseau, évitant par je ne sais quel miracle de finir ma course dans ce dernier, complètement trempée.
L'hostilité muette de la forêt face à mon intrusion bruyante m'écrasa de tout son poids. Je me relevai lentement, attentive à ne plus faire de bruit. Un mouvement furtif attira mon attention vers la saillie rocheuse que je venais d'abandonner de manière peu orthodoxe. Je crus discerner une ombre là-haut, mais elle se dilua dans les arbres alentours lorsque je cherchai à la distinguer plus précisément.
Je jaugeai ma situation présente. Impossible de traverser, l’épaisseur de boue de part et d’autre de cet affluent me dissuada de toute tentative en ce sens.
Je n’avais plus qu’à suivre le ruisseau, vers l’amont ou vers l’aval, en priant pour retrouver mon chemin un jour ou l’autre.
Je choisis l’amont, qui avait l’air plus praticable.
En suivant le large coude que faisait le ruisseau vers la droite, je traversai une haie d’arbustes que je ne sus identifier, et de l’autre côté, je découvris un paysage fabuleux éclairé en lumière rasante par les derniers rayons du soleil qui s’attardaient: une trouée irréelle dans la forêt, un tapis de champignons inconnus...
Alors, je les vis. Un drôle de petit vieux tout habillé de rouge, au milieu de dizaines de petits bonshommes bleus, pas plus haut que trois pommes.
C’est là que je me suis réveillée.
A bientôt mes petits clous !
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jeudi 23 septembre 2010
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11 commentaires:
tu prends quoi avant d'aller te coucher ? :D
C'est plus Valérie,c'est Alice ! T'as vu le lapin ? ou alors Blanche-neige (au milieu des nains).
ça devait être bizarre le livre que tu as lu hier soir !! ou alors c'est nos discussions sur les baskets qui te font cet effet :-)
stell*
Ben alors tu nous fait un remake de : Bambi, promenons nous dans les bois...
Tu as vu les Schtroumpfs !! Waouh.
en tous cas, tu écris drôlement bien. Tu n'as jamais pensé à écrire des bouquins ?
ça fait flipper, tout le début... vraiment magnifiquement écrit (comme toujours !)
Ouais, me fais plus des trouilles pareilles, j'en ai encore les poils dressés sur les bras... brrr !!
C'est tellement bien écrit que je le vivais en te lisant !!!
Un point commun : je rêve beaucoup et des rêves toujours, comment dire, bizarres ! Ton ambiance me rappelle un de mes rêves où je me voyais tomber dans un trou et je découvrais un monde parallèle sous terre... et dernièrement j'ai vu des images d'Alice au pays des merveilles que je n'avais jamais vu, ça m'a fait très très bizarre de découvrir les images de mon rêve !
@Flooe: des champignons, pourquoi??
@Eric: c'est presque ça, avec 10 ans de plus, des cheveux plus longs et plus clairs, une peau moins laiteuse et seulement 2 nains (qui a dit 3?)
@Stell: Stell désolée de t'enlever tes illusions, mais je rédige mes billets à l'avance ;)
@Bloody Mary: Le film d'horreur?
@astrocéline: en vrai, les schtroumpfs, je les vois tous les jours :D
@bbflo: merci!
@Marie: bon c'était peut être un PETIT PEU fait exprès aussi, j'avoue...
@Leoetlisa: pour dire toute la vérité, c'est pas mal inventé quand même, juste pour faire flipper avant le dénouement.. EN vrai je me souviens rarement de mes rêves (mais ils sont toujours très bizarres, par exemple ce matin je me suis réveillée avec la certitude d'être la mère de Manu Chao mais que je ne l'avais pas su jusque là, c'est lui qui me l'apprenait après un concert à la fête de la musique sur une pyramide en plein Paris)
Alors alors... ma petite Valou... il va falloir arrêter les champignons là ! hein ! très beau récit en tout cas ;) biz
Que de souvenirs!
Moi aussi je partais chercher seule des Bolets, moi aussi je découvrais des clairières, moi aussi j'étais parfois prise de peurs incontrolées et je fuyais à travers bois...
J'avais une dizaine d'années!
Cet article pour moi n'est pas un déjà vu, lol c'est un flashback!
Superbe!
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